mardi 13 avril 2010

La Grâce de Dieu



Ephésiens 2 : 1 - 9


Introduction

Mme Martin est professeur de français. Elle avait énormément de mal à gérer sa classe, à un tel point qu'elle a fini en congé de maladie. La classe qui lui posait problème était celle dont je m'occupais. Ensemble, nous avons essayé de trouver des solutions, mais vers la fin de sa période chez nous, elle était tellement traumatisée par ma classe qu'elle pleurait dès qu'elle me voyait. Une collègue (une dame très gentille) est venu me voir un jour pour me dire : "Tu sais ce que tu fais pour elle, elle ne le mérite pas". Cette phrase m'a choqué. La pensée m'est venue : heureusement que Dieu n'est pas aussi sévère que cette collègue !
Justement, aujourd'hui je voudrais parler de la grâce de Dieu. Qu'est-ce que c'est ? Comme début de réponse on peut dire que c'est exactement le contraire de l'attitude qu'a eu ma collègue. Mais plus précisément, la grâce de Dieu peut être comparée à un cadeau. Et ce cadeau (ou ce don) a 3 caractéristiques : il est immérité, inaccessible et irrésistible.

1. C'est un don immérité.
Nous sommes tous des Mme Martin, dans le sens où nous sommes tous imméritants. Peut-être ce discours choquerait certains. Ils diraient : l'homme est imméritant ?! Pourquoi ? L'homme est formidable, il a un potentiel immense, il est plutôt méritant. La psychologie humaniste dit que l'homme est fondamentalement bon et donc perfectible. C'est le message de l'évolution. J'ai même entendu un chant évangélique adressé à des non-chrétiens avec ces paroles "dans le désert de ton coeur il y a une fleur". Finalement à écouter les hommes, l'homme n'est pas si mauvais que tout ça. Nous irons tous au paradis.
Dans son chef d'oeuvre Du Serf Arbitre Martin Luther pose cette question à Erasmus; l'homme, que peut-il faire sans la grâce de Dieu ? Il y 3 réponses possibles : (i) Il peut faire le bien. (ii) Il ne peut faire ni le bien, ni le mal. (iii) Il ne peut rien faire de bien. Il peut faire uniquement le mal. Et c'est la dernière réponse qui est enseignée dans la bible.
Mais, on dira, qu'il y a des gens bien. Barack Obama par exemple est quelqu'un de bien. Certes, il n'est peut-être pas chrétien, mais il fait le bien. Il essaie de régler le monde de la finance, il a créé une sécurité sociale pour les américains démunis, il tend la main aux musulmans modérés. Tout cela est bien, n'Est-ce pas. Mais, comment le savoir ? Comment savoir ce qui est "bien" ? C'est quoi le critère ? Qui décide ? Je pense qu'on aurait un consensus sur le fait qu'un bon début serait de garder les 10 commandements. Quelqu'un qui garde les 10 commandements peut être considéré comme "quelqu'un de bien". La bible appelle cela "observer la loi". Et bien c'est justement cela le problème ! Parce que pour Dieu notre justice (nos bonnes oeuvres) est comme un vêtement souillé (Esaïe 64:6).
Rendez-vous compte ? Faire le bien c'est donc déplaire à Dieu ! Pourquoi ? Parce que : (i) il est impossible de respecter toute la loi tout le temps et Dieu qui est parfait n'accepte que la perfection. (ii) ceux qui cherchent à se justifier par la loi commencent à se croire méritants. C'était la faute des Pharisiens. Mais Paul dit clairement que ce n'est point par les oeuvres afin que personne ne se glorifie (V9). Le meilleur des hommes est donc sans mérite. Le seul acte qui plaît à Dieu c'est d'abandonner notre justice et de croire en la justice de son Fils.
Vous trouvez le tableau noir ? Trop pessimiste ? Mais ce n'est pas fini ! Non seulement l'homme est imméritant, mais il est déméritant. Non seulement nous ne méritons pas ce don, mais nous méritons exactement le contraire. Nous étions par nature fils de la rébellion, enfants de colère (V2 & 3). Nous méritons la colère de Dieu. Nous méritons l'enfer. Renversons ces forteresses à la gloire de l'homme, qui se sont construites sournoisement dans notre coeur et dans notre société ! L'homme n'est pas indifférent à Dieu, mais hostile. L'homme est l'ennemi de Dieu. Paul nous rappelle que nous suivions le prince de la puissance de l'air (V2). Nous sommes soit le serviteur de Dieu ou du diable. Il n'y a pas de zone grise. Personne n'est neutre. Nous ne méritions pas sa grâce, mais son jugement.
Ce don est donc un don immérité, car il n'est pas accordé sur la base de notre mérite.

2. C'est un don inaccessible.
Car c'est par la grâce que vous êtes sauvés ... Ce n'est point par les oeuvres, afin que personne ne se glorifie (V8).
Je travaille et donc je gagne un salaire. Mon salaire m'est dû, je l'ai mérité. Oeuvres & salaire & mérite vont ensemble. La grâce & le don vont ensemble. On ne peut pas gagner la grâce comme un salaire par nos oeuvres, ou nos efforts. La grâce, par définition, est donnée. Si Dieu ne nous la donne pas, elle est donc inaccessible pour nous.
Nous sommes des chrétiens, nous n'oserions pas suggérer que nous pouvons mériter la grâce de Dieu, que nous sommes sauvés par nos oeuvres. Mais nous sommes des hommes, et l'homme cherche constamment et par tous les moyens à se glorifier, à se réserver rien qu'un peu de mérite dans son salut. C'est dans notre nature, nous voulons y être pour quelque chose, aussi infime que ce soit. Nous raisonnons donc ainsi : "d'accord la grâce est un cadeau de Dieu immérité. Mais c'est pas un cadeau, s'il n'est pas reçu ! Ce n'est pas un cadeau, tant que je ne l'ai pas accepté" !
Moi-même je raisonnais ainsi. Je pensais que j'étais devenu chrétien parce que Dieu m'avait proposé sa grâce et aussi que je l'avais acceptée. Je croyais qu'en moi il y avait une étincelle, une lueur ("une fleur au fond de mon coeur" comme dit le chant évangélique) qui avait répondu à l'évangile et par conséquent, Dieu m'avait donné sa grâce. Pour moi, il y avait clairement une relation de cause à effet. Certes, Dieu a fait sa part, mais je devais faire le mien. Il avait fait 99.9%, mais je devais faire mon 0.1%. Je devais coopérer avec Dieu, sinon il ne pouvait pas me sauver. Je devais "accepter Jésus", ou pire "choisir Jésus".
Nous allons voir qu'une telle conception de notre rôle dans notre salut n'est ni biblique, ni logique, mais tout d'abord considérons les conséquences d'une telle conviction. Si j'estime que j'ai coopéré avec Dieu dans mon salut (lui propose, moi j'accepte) alors je ne suis pas si imméritant que tout ça. Après tout j'ai répondu à l'appel de l'évangile là où d'autres ne l'ont pas fait. J'ai donc un peu de mérite. Sinon, pourquoi ai-je répondu et pas un autre ? Est-ce dû à la chance ? Si je pars du principe que Dieu offre sa grâce à tous et que j'ai accepté et pas mon voisin, alors j'ai choisi de faire plaisir à Dieu là où l'autre a refusé et j'ai donc une raison de me glorifier, de me valoriser. Cette prière choquante de Charles Spurgeon, résume les conséquences dans notre coeur d'une telle conviction :
Seigneur, je te remercie que je suis né avec le pouvoir de me changer, de me décider pour toi. J'ai amélioré la grâce, la lumière, l'étincelle qui était en moi. Si seulement tous avaient fait comme moi, ils auraient pu être sauvés, eux aussi. Seigneur, je sais que tu nous aides, si nous nous aidons nous-mêmes. Tu donnes ta grâce à tous, certains ne la saisissent pas, mais moi je l'ai saisie. Ce n'est pas ta grâce qui a fait la différence entre eux et moi, certes elle a fait beaucoup, mais c'est mon attitude, ma décision qui l'a fait basculer. J'ai accepté ce qui m'a été donné, là où d'autres ont refusé.
C'est une prière délibérément choquante, mais je sais qu'il y a des chrétiens évangéliques qui croient cela. Je sais, puisque j'en étais un !
Qu'est-ce que je suis en train de dire, que le cadeau de la grâce de Dieu ne doit pas être accepté par nous ? Non ! Bien sûr que l'on doit l'accepter. Mais c'est quoi accepter ce don ? C'est d'y croire. C'est de croire à l'évangile. Mais cette foi vient-elle de nous ? La trouvons-nous en nous même, en nos propres ressources ? Fait-elle partie de l'étincelle au fond de notre coeur ? Que dit la bible ? C'est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi, et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu. Cette foi est le don de Dieu. Pour nous sauver Dieu exige de trouver la foi dans notre coeur et il la met dans notre coeur. Il remplit lui-même sa condition, c'est justement cela sa grâce. D'ailleurs, si ceci n'était pas le cas, le Nouveau Testament serait exactement comme l'Ancien Testament, à savoir une condition de la part de Dieu (observer la loi / croire à l'évangile) qu'aucun homme ne pourrait remplir. La différence avec la nouvelle alliance est que Dieu nous impose la condition de la foi et nous la fait remplir aussi par sa grâce.
Nous avons des amis qui sont sévèrement frappés par la crise. Ils sont très endettés. Un huissier les a contactés pour récupérer son argent. Imaginons que ce huissier impose ses conditions strictes : "vous devez rembourser la somme avant telle date sinon je vais saisir vos meubles". Et puis il verse lui-même l'argent sur le compte bancaire de l'ami. Il impose sa condition et la remplit, lui-même. Et bien aussi incroyable que cela puisse paraître c'est exactement ce que Dieu a fait pour nous. Il impose sa condition (la foi) et la remplit en nous. C'est le principe de la Réforme qu'on appelle Sola Gracia (la grâce seule).
Le cadeau de sa grâce nous est totalement inaccessible, car nos efforts sont inutiles, si Dieu ne nous le donne pas, nous ne pouvons pas nous la procurer.

3. C'est un don irrésistible.
Car c'est par la grâce que vous êtes sauvés.
La nature du don c'est le salut. La grâce de Dieu sauve. Ce n'est pas qu'elle ouvre la possibilité pour nous d'être sauvés, comme le disent certains. Non, elle nous sauve. Nous ne sommes pas "potentiellement sauvés" comme j'ai lu dans un livre chrétien récemment. D'ailleurs, que veut dire "potentiellement sauvé" ? Soit on est sauvé, soit on ne l'est pas.
Vous me direz peut-être. Oh là, stop ! Il faut savoir que Dieu est un parfait gentleman parce qu'il ne nous oblige pas à accepter son don. Il n'ira jamais à l'encontre de la volonté de l'homme. Il nous laisse libres, nous avons le choix. Je réponds que cette idée n'est pas biblique, heureusement ! Mais si nous réfléchissons un peu, c'est aussi un drôle d'idée. Imaginons que la maison de mes voisins brûle. J'y cours pour leur porter secours. Sur place j'essaie d'ouvrir la porte d'entrée, mais elle est fermée à clef. Quand les pompiers arrivent et me demandent si j'ai essayé de sauver mes voisins je réponds : "je ne pouvais pas entrer parce que la porte était fermée à clé, et je ne voulais surtout pas m'imposer. Je voulais les laisser libres de décider s'ils souhaitaient être sauvés où pas." Là-dessus les pompiers me diraient : "Quelle classe ! Quelle courtoisie ! Quel gentleman !" Non ! Ils diraient : "Quelle inconscience ! Dans un tel cas on défonce la porte et on traîne les gens dehors, s'il le faut, pour les sauver". Ensuite, je serais mis en examen pour non-assistance à personnes en danger.
En effet, je pourrais penser à beaucoup d'adjectifs pour décrire une telle personne, mais cela ne serait pas un "parfait gentleman".
Je connais une jeune fille anorexique. Alors qu'elle est très maigre, elle pense qu'elle est grosse. Je prie que Dieu lui ouvre ses yeux. Qu'il agisse contre sa volonté, qui est de maigrir encore. Qu'il contrarie sa volonté, si c'est pour la guérir. Si Dieu la laisse libre pourquoi prier pour elle ? D'ailleurs, lorsqu'on prie pour nos proches qui ne connaissent pas le Seigneur, on demande à Dieu d'intervenir dans leur coeurs, de leur ouvrir les yeux, bref de leur faire grâce. S'il est vraiment le parfait gentleman, dans le sens où il ne veut pas les contrarier, et  il veut surtout les laisser libres, pourquoi prier ? Il ne fera rien de toute façon ! Heureusement qu'il ne nous laisse pas libres, sinon qui serait sauvé ?
La vérité c'est que vous étiez mort par vos offenses et par vos péchés (V1). Mais Dieu nous a rendu vivants, il nous a ressuscités (V4). Nous étions morts. Dieu par sa grâce nous a ressuscités. Il l'a fait. Et c'est dans ce sens qu'il est un parfait gentleman; non pas parce qu'il nous a laissés libres, mais parce qu'il nous a ressuscités de la mort. Il nous a fait naître de nouveau. Il a fait de nous une nouvelle création. Il a échangé notre coeur de pierre en un coeur de chair. C'est la régénération. Dieu l'a fait.
D'ailleurs c'est logique. Paul ne choisit pas ici la métaphore d'un mort par hasard. Un cadavre représente notre incapacité totale. Qu'est-ce qu'un mort peut-il faire pour son salut ? Un mort a besoin de vivre avant de pouvoir faire quoi que ce soit. Sans cette nouvelle naissance, ce nouveau coeur, cette force vivifiante de l'Esprit en nous, nous serions aussi impuissants qu'un Lazare qui voudrait se ressusciter par sa propre force. Si Jésus n'intervient pas Lazare reste mort. Si Dieu n'intervient pas, je reste mort. C'est simple ! Nous laisser libres c'est donc nous laisser morts. C'est pour cela que je parle de grâce irrésistible. Parce que sa grâce nous sauve malgré nous.
Je connais un homme qui un soir marchait le long de la plage à Dieppe. Soudain, il a entendu ce qu'il croyait être une mouette crier dans la mer. En s'approchant, il s'est rendu compte que ce n'était pas une mouette, mais une femme qui appelait à l'aide. Un autre homme était sur le sable et l'appelait pour qu'elle nage vers la plage, mais elle ne réagissait pas. Alors le premier homme s'est jeté dans la mer pour la sauver. Quand il est arrivé à proximité de la dame, plutôt que d'être contente, elle s'est mise à se débattre, à un tel point qu'elle a failli les faire noyer tous les deux. Il a, cependant, réussi à l'emmener vers la plage. Plus tard, il a appris qu'elle voulait se suicider. Mes amis, nous sommes comme cette dame. Dieu ne nous envoie pas une invitation à croire (comme l'homme qui l'appelait pour qu'elle nage vers la plage), mais il nous ressuscite des morts (il plonge dedans et il nous traîne dehors, malgré nous, malgré notre volonté de nous suicider dans notre péché). Dieu ne nous envoie pas un faire-part, il nous arrache du feu de l'enfer. Et c'est dans cela qu'il est le parfait gentleman. C'est donc un don irrésistible.

Conclusion
La grâce de Dieu est :
- imméritée, car elle n'est pas accordée sur la base de notre mérite.
- inaccessible, car nos efforts sont inutiles pour l'atteindre
- irrésistible, car Dieu nous sauve, malgré nous.

Soyons clair, nous ne sommes pas des chrétiens parce que nous sommes plus gentils que ceux qui sont dehors, plus aimables que ceux qui ne viennent jamais à l'église, ou meilleurs (plus méritants / moins coupables), que ceux qui se moquent de Dieu. La seule différence entre eux et nous c'est la grâce de Dieu. Ce n'est pas l'état de mon coeur, pas ma plus grande foi, pas je ne sais quelle étincelle ou quelle fleur au fond de moi qui a fait que j'ai décidé et pas eux, c'est la grâce de Dieu afin que personne ne se glorifie et que toute la gloire revient au seul vrai méritant - Jésus Christ. Lui, qui a non seulement fait tout pour nous sauver, mais qui a aussi fait tout en nous, pour appliquer son salut dans notre coeur.

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