mercredi 5 février 2014

Le Problème du Canon de la Bible



J’avais prévu de terminer ma série sur la bible avec mon dernier message. L’idée de terminer en parlant de Jésus me plaisait beaucoup. Cependant, c’était sans compter sur les différentes questions que cette série allait soulever chez certains. J’ajoute donc cette étude par nécessité, comme un appendice à ma série. C’est une étude plus technique que les autres. Mais c’est une étude nécessaire, car la bible est attaquée aujourd’hui comme jamais avant. Des étudiants chrétiens au lycée et à la fac perdent leur confiance en la bible et donc dans la foi chrétienne à cause des argumentations que je vais réfuter dans cette étude.

Voici le problème. Dans mon message Sola-Scriptura j’ai défini la bible comme étant les 66 livres de Genèse à l’Apocalypse. Certains m’ont demandé de justifier cette définition de la bible. Ce qui me frappe c’est que les sceptiques, les modernistes, les athées et même les Catholiques ont ici le même but, à savoir, insinuer que l’autorité de la bible n’est pas intrinsèque; que son autorité vient d’ailleurs et ceci afin de nuire à l’autorité de la bible. Je voudrais donc prendre le temps dans cette étude d’établir la vérité concernant ce que l’on appelle le Canon des Ecritures et par le même de rassurer certains chrétiens évangéliques qui ont pu être perturbés par ces fausses objections.

Dans un premier temps, je voudrais définir ce que c’est le canon. Ensuite, je voudrais présenter les argumentations que ces perturbateurs utilisent contre la bible, pour montrer point par point les incohérences et inexactitudes dans leurs argumentations, afin de démontrer que leurs attaques contre la bible sont infondées.*

 

1. Ma position

Premièrement, définissons ce que c’est le canon. Le mot canon vient du grec κανών signifiant "règle ou modèle", lui-même emprunté à l'hébreu qaneh "roseau, mesure, canne". Et le Canon des Ecritures signifie "la norme des écritures". La question du canon de la bible est donc; c’est quoi la bible ? Quels livres font partie de cette norme ? Quels livres sont dedans et quels sont dehors ?

Le premier commentaire que je veux faire ici c’est que pour le chrétien, la bible est la Parole de Dieu. Il s’agit de déterminer quels livres sont la Parole de Dieu et donc par implication lesquels ne le sont pas. Donc, la première chose à reconnaître est que la question du canon de la bible n’est pas une question historique. C’est une question de doctrine. Contrairement à ce qu’affirment les Catholiques et les internautes anti-chrétiens en tout genre, on ne définit pas le canon on faisant une leçon d’histoire, mais une leçon de doctrine biblique. Ceci est fondamental. Considérer le canon premièrement ou uniquement d’un point de vue historique c’est mettre la charrue avant les bœufs. C’est comme si on considérait les miracles de Jésus uniquement d’un point de vue historique. Notre théologie doit être correctement en place pour comprendre les miracles. Par exemple, il y a des gens qui essaient de comprendre les miracles de Jésus, sans croire en Dieu. Pour eux les miracles sont logiquement impossibles. Ils y trouvent des explications purement naturelles. Il leur est donc impossible de comprendre les miracles, car leur doctrine est erronée. C’est pareil avec la question du canon. Si nous n’avons pas une doctrine biblique de la bible, alors nous faisons fausse route. La question du canon de la bible est avant tout une question de doctrine.

Malheureusement, la plupart des livres évangéliques abordent ce sujet essentiel d’un point de vue purement historique, sans étudier la doctrine biblique de la Parole de Dieu. Il est vrai qu’une bonne connaissance de l’histoire de l’église est importante pour démasquer les erreurs des opposants à la bible, ce que je vais faire dans cette étude. Mais il ne faut pas commencer là. On doit commencer avec la doctrine. On doit commencer avec l’enseignement de la bible sur la bible. C’est le principe de Sola-Scriptura.

Par conséquent, on peut répondre à la question sur la définition de la bible comme ceci : le Canon des Ecritures est la collection de livres inspirés, que Dieu a donnés à son église universelle. Donc, contrairement à ce qui est souvent dit, le canon n’est pas quelque chose que les hommes ont établie ou décidée. C’est Dieu qui décide ce que c’est le canon des Ecritures. Ce point est fondamental. C’est Dieu qui décide ce qu’il a dit et n’a pas dit, pas nous. Les hommes peuvent recevoir sa Parole, l’affirmer, lui obéir (ou pas), mais les hommes ne sont pas les agents qui constituent sa Parole. C’est Dieu, en parlant, qui constitue son propre canon. Donc, en principe, le Canon des Ecritures pourrait exister, sans qu’aucun homme ne le sache. Un canon pourrait exister sans l’avis ou l’approbation d’aucun homme, car c’est Dieu qui crée le canon.

Deuxièmement, il faut reconnaître que la bible prétend ne pas être comme tous les autres livres. Ce livre prétend être la pensée de Dieu. Donc, encore une fois, si nous le traitons comme les autres livres, nous faisons fausse route, car on rencontre Dieu dans ce livre. Et on ne peut pas rencontrer Dieu sans l'Esprit de Dieu. Donc, il faut aborder ce livre avec une théologie bien définie avant de le lire. C’est-à-dire, soit on l’accepte comme la Parole de Dieu, soit on le rejette. Et si on le rejette, comme le sceptique, et l’athée, on ne le comprendra jamais, car on ne comprend pas la Parole de Dieu sans l'Esprit de Dieu. Ils détestent ce discours, mais c'est la vérité. Tout comme Dieu s'authentifie lui-même, la Parole de Dieu s'authentifie. Elle a autant d'autorité que lui, car elle est sa Parole. Seuls les Protestants évangéliques ont cette haute idée de la bible. Les Catholiques reconnaissent que la bible est inspirée, mais prétendent qu’elle n’est pas suffisamment inspirée pour pouvoir s'authentifier seule. Pour eux la Parole du Dieu vivant a besoin de l’approbation de l’homme pour être autoritaire. Quelle idée insensée !

Avec ces présuppositions affirmées, assumées et bien en place, examinons les argumentations des opposants à la bible.

 

2. Leurs Argumentations.

i) Le Nouveau Testament n’existait pas avant le IVe siècle. Donc la doctrine de Sola-Scriptura ne pouvait pas exister avant cette date. Donc c’est une doctrine auto-réfutante.

Cette argumentation est fallacieuse à plusieurs niveaux. Premièrement, c’est un argument du silence. Ce n’est pas parce que nous n’avons pas connaissance d’une liste des 27 livres du NT que l’église a pu dresser, datant d’avant le IVe siècle, qu’une telle liste n’a jamais existé. Mais plus encore, c’est une erreur de catégorisation. Ce n’est pas parce qu’il n’y avait pas de liste des livres du NT que ces livres n’existaient pas !

Voici une illustration. Je suis auteur. J’écris des livres. Il y a donc un canon de mes livres. Or, je n’étais pas obligé d’écrire la liste de mes livres pour que ce canon existe. Dès que j’avais terminé mon premier livre, mon canon existait. C’est pareil pour le canon de la bible. Dire que le Nouveau Testament n’existait pas avant le IVe siècle est donc absurde. Les livres existaient. Dieu connaissait ses livres, car le Canon des Ecritures est son œuvre.

Mais selon Rome, les Ecritures ne peuvent pas être considérées comme les Ecritures dans l’église, sans être validées par l’autorité de l’église. La Parole de Dieu a besoin de l’aval de l’homme pour être la Parole de Dieu. Voici leur problème. Premièrement, si on ne peut pas avoir un canon fonctionnant dans l'église sans une définition infaillible de ce qu’est le canon, alors comment un Juif vivant 50 ans avant la naissance de Jésus savait-il que 2 Chroniques ou le Cantique des Cantiques étaient inspirés de Dieu ? Il est à noter qu’aucune des disputes entre les pharisiens et Jésus n’était sur le canon. Quand Jésus citait l’Ancien Testament, personne ne lui répondait que ce qu’il avait dit n’était pas dans les Ecritures. Quel concile infaillible avait donc choisi ces livres pour que tous les acceptent ? Si aucun concile ne les avait validés, comment savait-ils tous que ces livres étaient les Ecritures ? Si le Juif le savait sans concile, pourquoi le chrétien en a-t-il besoin ? Deuxièmement, si le NT ne peut pas être autoritaire dans l'église sans une définition infaillible de ce qu’est le canon, alors cela pose un gros problème pour les Catholiques, car la première fois que Rome s’est prononcée de façon dogmatique sur le canon était en 1546. Si la doctrine de Sola-Scriptura est auto-réfutante parce qu’il n’y avait pas de NT reconnu avant le IVe siècle, que dire de l’autorité de la bible catholique ?

 

ii) Il y avait aussi beaucoup d’autres livres qui circulaient dans les églises. Certains étaient inclus dans la bible au début et ensuite retirés.

Les gens qui formulent cette objection ont trop regardé le Da Vinci Code et ont trop peu étudié l'histoire ! Le problème avec cette argumentation est qu’elle est anachronique. L’évangile de Thomas et l’évangile de Pierre (souvent cités pour illustrer cette argumentation) n’étaient même pas écrits à l’époque où les 4 évangiles circulaient. Ils ont été écrits seulement une centaines d’années après les évangiles. Il est donc faux de donner l’impression que tous ces livres circulaient en même temps dans les églises et que les églises les considéraient tous comme égaux. Il y avait déjà un grand consensus sur les 4 évangiles avant même que ces pseudo-évangiles n’aient été écrits.

Comment en être si sûr qu’il y avait consensus ? Parce que les manuscrits le prouvent. Les premiers chrétiens n'écrivaient pas sur des volumen (ou des papyrus), mais sur des codex. Un codex est comme un livre. Et on pouvait y rassembler plusieurs livres dans un seul codex. Un codex pouvait jouer le rôle d'une petite bibliothèque portable. Par exemple, il existe des codex qui sont des collections des 4 évangiles, datant de la fin du IIe siècle (P4, P64 et P67). Il y a aussi un codex qui est une collection des lettres de Paul (P46) etc. Donc, cela nous montre qu'au IIe siècle les chrétiens commençaient à voir ces différents livres (évangiles et lettres) comme une unité. Pourquoi Est-ce que ceci est important ? Parce que cela montre qu'il y avait déjà une conscience canonique dans l’église environ un siècle après la mort de Jésus et aussi une idée précise sur la façon dont ces livres devaient être assemblés (évangiles ensemble, lettre ensemble etc.). Et tout ceci sans aucune déclaration officielle de l'église !

Et que voit-on dans ces codex ? On voit systématiquement que la collection des évangiles est la même que celle que nous avons aujourd'hui. Par exemple, on ne voit jamais une collection de Mathieu, Marc, Thomas et Jean ou encore de Mathieu, Marc, Luc et Pierre. Ceci contredit ce que les opposants à la bible affirment. Les autres évangiles qui circulaient plus tard n'étaient pas considérés comme inspirés comme les 4 évangiles originaux. C’est la preuve documentaire que le consensus autour des évangiles était constant et généralisé très, très tôt dans l'histoire de l'église.

Mais, protestent certains, le codex P72 est le plus vieux manuscrit existant aujourd'hui et bien qu’il contienne 1 & 2 Pierre et Jude, il contient aussi des livres apocryphes. Ceci prouve que les faux livres circulaient avec des vrais dans l’église, n'est-ce pas ? Pas vraiment, quand on regarde P72 de près, on voit que c'est un codex étrange. Il contient des pages dont les numéros ne se suivent pas et dont l'écriture est différente d'une page à une autre. P72 donne l'impression d'être une collection personnalisée de livres dans laquelle les pages arrachées de 1 & 2 Pierre et Jude ont été collectées et ajoutées à des livres apocryphes dans le codex. Ceci expliquerait le décalage dans les numéros des pages et la différence d'écriture. Ce codex atypique est probablement un manuscrit personnalisé que quelqu'un a fabriqué pour sa lecture personnelle. C'était un Kindle ancien ! Il est l’exception qui confirme la règle.

Un autre exemple souvent cité est le Codex Sinaiticus. C'est un manuscrit quasi-complet du Nouveau Testament datant du IVe siècle. Il est vrai qu'il contient les livres apocryphes comme l'Epître de Barnabé et le Pasteur d'Hermas. Mais ce qu'il faut noter (et ceux que les opposants à la bible ne disent jamais) est que ces livres apocryphes ne sont justement pas inclus dans le canon. Ils sont placés après le livre de l'Apocalypse. Et ceci est le cas dans tous les autres codex qui contiennent livres bibliques et apocryphes. C'est assez surprenant, car les livres apocryphes sont souvent des lettres, alors pourquoi ne pas les mettre avec les lettres de Paul ? Après tout, il y a de multiples auteurs dans le NT, cela n'aurait posé aucun problème de mettre 1 & 2 Clément, par exemple, entre Jacques, Pierre et Jean, si les chrétiens considéraient ces lettres comme étant inspirées. Si ces livres faisait vraiment partie du canon, pourquoi les mettre après le canon ? On pense que ces livres étaient inclus dans certains codex comme des livres utiles à lire. Quoi qu’il en soit, ils sont toujours bien distincts des autres livres du NT. Il faut savoir que cette pratique était une règle généralisée. Il n'y a aucune liste de livres de cette époque dans laquelle les livres apocryphes sont mélangés avec les livres canoniques. Aucune. Donc, parmi tous les codex de la bible qui existent, les codex et les listes qui contiennent des livres apocryphes mettent toujours les livres apocryphes en dehors de notre NT. Donc, même ces codex, que les Catholiques et les athées utilisent pour nuire à l’autorité intrinsèque du NT, ne font que la renforcer. Ceci prouve, donc, que ces autres livres n'étaient pas considérés comme les égaux des livres du NT.

 

iii) La bible que nous avons aujourd’hui n’est pas tombée du ciel comme ça, si nous l’avons c’est bien parce que quelqu’un a décidé quels livres devaient être inclus dans le canon de la bible.

Les opposants à la bible disent que c’est au Concile de Nicée (en 325) que le canon a été formé. Ils affirment que dans ce concile, on a choisi l'évangile de Jean, et on a rejeté l’évangile de Thomas. Notons tout d’abord, que c’est tout de même assez surprenant que l’argumentation avancée par Rome est exactement la même que celle avancée par les athées et le modernistes pour prouver que la bible n’est pas autoritaire ! Je crois que ce fait est déjà très révélateur. Mais, sur le fond, où sont les preuves historiques de ces décisions ? Si on affirme que c’est au Concile de Nicée que le canon a été formé, il faut pourvoir fournir des documents historiques qui le prouvent. Où sont les documents qui précisent que ce concile a été réuni pour décider du canon ? Où sont les documents qui montrent que les gens présents étaient conscients de choisir les livres qui devaient constituer la bible ? Il n'y en a pas. Cette idée est sans aucun fondement.

En réalité, les conciles qui ont prononcé sur le canon dans les IVe et Ve siècles ne sont pas des conciles œcuméniques, mais régionaux. Et ces conciles n'ont pas choisi certains livres plutôt que d'autres, il n’ont fait qu’affirmer ce que l’église croyait déjà. La différence est énorme. Affirmer en quels livres on croit, n’est pas la même chose que créer une bible. A toutes les époques l’église a affirmé ce qu’elle croit. Nous le faisons encore aujourd’hui. Nous écrivons des confessions de foi pour affirmer ce que nous croyons.

D’autres disent que c’est Athanase d'Alexandrie qui était le premier a fondé le canon dans sa Lettre Festale (vers 360) dans laquelle il donne la liste des 27 livres du NT. Mais même Athanase ne raisonne pas ainsi : "maintenant je vais décider pour toute l’église quels sont les livres de la bible parmi tous ceux qui circulent". Non, il affirme tout simplement ce qu’il croit.
Voici l'erreur logique élémentaire que font ces perturbateurs. Ils concluent que puisque quelqu'un affirme une doctrine et que son affirmation est la première trace que nous avons de cette doctrine, alors cette doctrine a forcément commencé à ce moment-là. En logique on appelle cela affirmer le conséquent : si A, alors B. B, donc A. Si le canon avait été décidé par Athanase, ses écrits seraient la première trace que nous aurons du canon. Ils sont la première trace que nous avons du canon, donc le canon a été décidé par Athanase. Voici un autre exemple pour montrer l’absurdité de ce raisonnement. Si mon épouse n'avait jamais existé, elle ne serait pas dans cette pièce avec moi. Elle n’est pas dans cette pièce avec moi, donc elle n'a jamais existé. (Je promets qu’elle existe bien !).

La réalité est que si on demandait à Athanase d'Alexandrie; "pourquoi avez-vous choisi Mathieu, Marc, Luc et Jean ?" Il répondrait; "comment ça, ‘choisi’ ? Ces livres nous ont été transmis. Ils viennent de Dieu. Nous ne les avons pas choisis, nous les avons reçus de Dieu". Ceci est corroboré par les Pères de l’église. Ils ne parlent jamais de livres qu’ils ont "choisis", mais de livres qu'ils ont "reçus", non pas de livres "sélectionnés", mais de livres "transmis".

D’ailleurs, une des argumentations souvent avancée par les opposants à l’autorité intrinsèque de la bible est l’exemple de Marcion. Marcion a formé sa propre bible. Il a mutilé les 4 évangiles pour faire un grand évangile édité de Luc. Ensuite, il a enlevé tout ce qu'il trouvait offensant dans les écrits de Paul. Selon nos amis Catholiques, ceci est la preuve que c'était le chaos dans l'église primitive concernant le canon. N'importe qui faisait circuler n'importe quoi et le présentait comme les Ecritures. Mais, je crois que l'exemple de Marcion prouve justement le contraire. Le fait que quasiment tous les Pères de l'église ont écrit contre Marcion prouve justement qu'il y avait un grand consensus dans l'église sur ce qu'était le canon. Après tout, si ce que disent les opposants à la bible est vrai, pourquoi y-avait-il une si grande réaction contre Marcion ? Si c'était vraiment le chaos dans l'église et n'importe qui faisait circuler n'importe quoi comme les Ecritures, alors Marcion ne faisait rien d'inhabituel. Les premiers chrétiens auraient tout simplement dit : "voilà encore quelqu'un avec encore une autre opinion sur la bible. Et alors ?"

Par contre, s'il y avait un consensus généralisé très tôt sur la bible, c'est exactement la réaction qu'on s'attendrait à voir contre quelqu'un qui attaquait ce canon. Le cas de Marcion donc, loin de prouver l'état chaotique de l'église primitive concernant le canon, prouve que puisque tant de chrétiens se sont mobilisés contre lui, c'est bien parce qu'il enfreignait la norme acceptée de tous, c'est-à-dire le canon de la bible. En effet, la seule explication pour la condamnation généralisée que Marcion a suscitée est qu’il s'opposait à une norme déjà existante et acceptée. Pour pouvoir le condamner ainsi, l'église montre qu'elle s'attendait à ce qu’il sache quels livres étaient inspirés. Après tout, comment condamner quelqu'un s'il lui était impossible de savoir quels livres étaient les Ecritures ? Comment condamner quelqu'un pour avoir enfreint la règle, s'il n'y avait pas de règle établie à enfreindre ?

Les gens qui avancent cette argumentation commettent le sophisme d’une généralisation précipitée. Ils concluent que puisque certaines personnes n'étaient pas d'accord sur le canon, cela prouve que personne n'était d'accord sur le canon !

 

iv) C'était les successeurs des apôtres en concile qui ont décidé quels livres étaient inspirés et quels ne l’étaient pas. Comment accepter l’autorité des livres, sans accepter l’autorité de ceux qui ont choisi ces livres, c’est-à-dire de l'Eglise ?

Encore une fois, il ne suffit pas d’affirmer, il faut documenter. Où sont les documents qui attestent que ces chrétiens se considéraient comme "les successeurs des apôtres" ? Où sont les documents qui attestent que ces chrétiens ont pris une décision qu'ils considéraient comme dogme pour l'église universelle pour toujours concernant la Parole de Dieu ? Je veux voir ces manuscrits ! Où sont-ils ? Donnez-moi leur nom.

Au contraire, personne à cette époque ne se considérait comme le successeur de Pierre ou de Paul. Ceux à qui certains prêtent une telle idée (Le Pères de l’église) sont justement très prudents dans leurs écrits de se distancier par rapport à l’autorité des apôtres. Ils enseignent que, contrairement à eux, les apôtres avaient une autorité unique.

Le Catholique répondra que ces décisions ont été prises à Hippone, à Carthage et à Rome (en 382). Mais, encore une fois, il ne suffit pas de l'affirmer, il faut le documenter. Donc, je repose la question; où est la preuve que les conciles d’Hippone, de Carthage et de Rome se considéraient comme des conciles apostoliques ? Où est la preuve que ces gens se voyaient comme des successeurs des apôtres, ayant autant d’autorité sur l’église universelle que Pierre et Paul ? Ces affirmations n’ont aucun fondement historique. Ce sont de conciles régionaux, tout simplement. Affirmer que ces chrétiens se considéraient comme "les successeurs des apôtres" créant des dogmes contraignants pour toute l’église et pour toujours est une lecture tellement anachronique de l’histoire de l’église qu’elle frôle le révisionnisme ecclésiastique.

Pour nous Protestants, le consensus de l‘église sur les 27 livres du NT n’est pas sans importance. Il joue un rôle dans notre acceptation de ces mêmes livres. Mais, cela ne veut pas dire que nous croyons que l’église ait constitué le canon. Cela ne veut pas dire qu’il nous serait impossible de savoir que ces livres sont le canon sans l’église. Le Protestant voit le rôle de l’église comme un thermomètre. Le thermomètre rend compte de la température ambiante. La température est ce qu’elle est et le thermomètre réagit en conséquence. De même, nous reconnaissons le canon pour ce qu’elle est – la Parole de Dieu. Par contre, le Catholique voit le rôle de l’église non pas comme un thermomètre, mais comme un thermostat. Le thermostat détermine la température. Pour le Catholique l’église détermine le canon. Pour le Protestant, elle en rend compte. Pour le Protestant, donc, l’église joue un rôle important, mais n’a pas autorité sur la bible. La Parole de Dieu a une autorité intrinsèque. Elle s’authentifie seule. Dieu n’a pas besoin d’hommes pour valider sa Parole, pour l’approuver avec son cachet : "La Parole de Dieu – approuvée pour votre usage par les hommes". L’idée est absurde. Sa Parole est écrite dans les cieux pour l’éternité. L’homme est une vapeur éphémère.



Conclusion

Ceux qui utilisent les argumentations ci-dessus ont un seul objectif : faire croire qu’au début de l’ère chrétienne c’était le chaos dans l’église; qu’il n’y avait aucun consensus sur le canon du NT; que personne n’était d’accord sur l’identité des livres canoniques et apocryphes; et que c’est seulement lorsqu’un concile de l’église est venu mettre de l’ordre là-dedans qu’il y a eu unité. Leur but est de nuire à l’autorité de la bible.

J'ai montré les très nombreuses argumentations fallacieuses dans leurs argumentations. A travers les exemples des premiers codex, de Marcion et des documents datant des premiers conciles, j'ai aussi montré que la réalité était toute autre. Il y avait un grand consensus sur le canon très tôt dans l’église, bien avant les conciles du IVe siècle. En démontrant qu’il y avait un consensus dans l’église sur les 4 évangiles des siècles avant les conciles, j'ai prouvé en même temps que les chrétiens pouvaient savoir quels livres étaient de Dieu sans recours à un concile officiel. Donc, s’il y avait ce niveau d’unité sur le canon avant l’existence d’une papauté, cela prouve que nous n’en avons pas besoin.



*Je suis endetté envers B B Warfield et Dr Kruger pour cette étude.